TTIP, CETA, TISA, ou la menace des acronymes en quatre lettres : les méga-accords commerciaux requièrent toute notre vigilance. Pour nous, le principal enjeu du commerce international au XXIe siècle est d’œuvrer pour une mondialisation réglementée, solidaire et respectueuse de notre planète ; donc en tout point différente de la mondialisation sauvage que nous connaissons. Forte de ses 500 millions de consommateurs, l’Union européenne dispose d’une force de négociation considérable pour faire prévaloir les normes qu’elle aura définies comme conditions d’accès à son marché. Elle doit en user afin de promouvoir des normes mondiales conformes à ses valeurs et ne pas conclure d’accord commercial contraire aux intérêts de ses salariés et consommateurs. Avec conviction, la délégation a remporté une première victoire au début de cette législature : la famille sociale-démocrate s’est opposée à l’arbitrage privé dans le cadre du règlement des différends entre États et investisseurs dans l’accord commercial avec les États-Unis (TTIP) et dans tous les accords similaires.

Quant au CETA – l’accord commercial avec le Canada –, notre opposition n’a pas suffi à empêcher son approbation par le Parlement européen. Pour nous, cet accord constitue une menace directe pour l’emploi dans nos territoires et n’intègre ni l’urgence climatique et environnementale ni le principe de précaution. Mais le combat et la mobilisation de la gauche européenne continuent. Pour tirer les leçons du débat sur ces accords, nous appelons à la définition d’une nouvelle doctrine du commerce international applicable à tous les accords futurs, qui passe par des principes non négociables et exige la transparence des négociations.

À côté de cette défaite, notamment due à la majorité conservatrice, les eurodéputés socialistes et radicaux ont remporté des victoires importantes, comme celle sur ce qu’on appelle les « minerais de sang ». Derrière cette expression se cache le commerce de ressources naturelles qui alimente des conflits armés, dont les premières victimes sont les populations civiles. Ces matières premières, nous les utilisons tous les jours dans nos téléphones ou nos ordinateurs. Grâce à la mobilisation constante des socialistes et démocrates, et face à une Commission européenne peu allante sur le dossier, tous les importateurs – fondeurs, raffineurs, mais également fabricants de produits manufacturés – européens et non européens, seront désormais tenus de certifier l’origine des minerais utilisés. Cette victoire est un vrai progrès pour faire cesser violences et atrocités.

 

Focus sur la Chine, une économie de marché ?

La Commission européenne, soutenue par plusieurs États libéraux, a un temps envisagé d’octroyer à la Chine le statut d’économie de marché, alors même qu’elle n’en remplit pas les critères. Un tel changement aurait empêché l’Union européenne d’opposer des mesures anti-dumping aux produits chinois, pourtant vendus à des prix incomparablement bas. Face à cette proposition, les eurodéputés socialistes et radicaux ont été les premiers à partir au combat. Depuis le début de la mandature, nous luttons aux côtés de syndicats et des représentations industrielles pour renforcer l’arsenal anti-dumping de l’Union. Nous sommes alors parvenus à faire en sorte que la Chine ne soit pas traitée comme une économie de marché et à influer ainsi sur le cours des négociations politiques pour obtenir un véritable durcissement de la méthodologie anti-dumping européenne. Si nous pouvons nous féliciter d’avoir inscrit la lutte contre la désindustrialisation au sommet de l’agenda européen, il s’agit désormais de convaincre la Commission et le Conseil, au sein duquel les libéraux continuent d’occuper une place prépondérante, des vertus de cette approche protectrice.

« Face à la Chine, l’Europe ne doit pas être l’idiot du village planétaire. Il faut vraiment que l’Europe se dote d’une véritable stratégie commerciale pour protéger ses salariés »

Emmanuel Maurel