Remettre l’Europe sur les rails d’une croissance équitable est une nécessité absolue ; cela passe notamment par la perspective d’une véritable intégration budgétaire, fiscale et sociale. Nous avons ici un désaccord fondamental avec les conservateurs. Ces derniers pensent que la crise est là parce que les règles ne sont pas appliquées ; nous pensons au contraire que les règles sont mauvaises ou insuffisantes pour faire fonctionner une économie comme celle de la zone euro. Jusqu’à présent, la droite européenne a imposé sa vision de la gouvernance économique, en restant arcboutée dans son idée d’imposer, partout, l’austérité.
Heureusement, au début de cette législature, nous avons fait de l’adoption d’un plan d’investissements, devenu le « plan Juncker », un pilier du programme de travail de la mandature. La mise en place de ce fonds est une victoire pour nous et doit aller de pair avec une modification de la gouvernance économique, car l’Union ne peut être une machine à sous-investir. Nous marquons des points.La Commission européenne commence à pointer les déséquilibres de l’Allemagne, qui, bien qu’excédentaire, n’investit pas assez dans les infrastructures, la recherche et l’éducation et ne soutient pas sa demande intérieure. Le déficit d’investissements, lorsque l’on en a les moyens, est en effet déstabilisateur pour l’Europe.
Par notre travail de conviction, nous avons obtenu que le Parlement européen se prononce en faveur de la création d’un budget dédié à la zone euro. Cette dernière doit poursuivre son indispensable intégration et sa démocratisation. L’enjeu, c’est bien la convergence par le haut des économies de la zone euro. Convergence sociale d’abord, notamment en matière de salaire minimum. Convergence fiscale aussi, à travers l’impôt sur les sociétés. Un véritable budget pour la zone euro, doté d’une capacité d’endettement, permettrait ainsi d’atténuer les chocs économiques symétriques, qui concernent l’ensemble de la zone euro, ou asymétriques, qui ne concernent qu’un ou plusieurs pays, mais ont des répercussions sur les autres. Pour y parvenir, nous soutenons les propositions du Parlement visant à mieux utiliser le Mécanisme européen de stabilité, à renforcer le rôle des parlementaires et à créer un poste de ministre des Finances de l’eurozone, en fusionnant commissaire à l’économie et président de l’Eurogroupe.
Focus sur la Grèce
Bien avant l’élection de M. Tsipras, les eurodéputés socialistes et radicaux français ont été à l’initiative d’un rapport appelant au démantèlement de la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international). Ces trois institutions ont en effet imposé à la Grèce des politiques d’austérité sans mandat démocratique européen. Il est indispensable qu’à l’avenir les parlementaires soient directement associés au processus de décision des fameux « programmes d’ajustement macro-économique », si d’autres devaient être décidés. Enfin, alors que la Grèce a fait des efforts considérables, que ses comptes publics se redressent, nous plaidons régulièrement pour un rabais sur la dette grecque.
Focus sur la justice fiscale
Le scandale du LuxLeaks a éclaté fin 2014. Aussitôt, nous avons relancé l’une de nos propositions phares : les multinationales doivent payer leurs impôts là où elles font leurs bénéfices. Nous voulons une fiscalité juste. Celle qui assure la redistribution et le financement des services publics, celle qui favorise le travail et l’initiative plutôt que le capital et la rente, celle qui soutient la transition écologique. La situation actuelle a des conséquences dommageables sur les budgets des États et mine le projet européen. Il faut le savoir : la fraude fiscale prive l’Europe, et ses États, de 1 000 milliards d’euros par an. Contre l’opacité et la fraude, contre l’évitement fiscal des plus riches, alors que la droite impose l’austérité pour les plus pauvres, nous exigeons une mesure concrète pour lutter contre l’optimisation fiscale : imposer aux multinationales une transparence comptable pays par pays. Ainsi, les entreprises devront publier toutes les activités de leurs filiales, État par État, y compris dans les paradis fiscaux. Ce « reporting pays par pays » doit absolument être public au niveau européen.
« La zone euro doit tirer, enfin, le meilleur parti de sa monnaie. Le budget de la zone euro doit servir une stratégie d’investissement et de plein emploi, de solidarité et de convergence mais aussi de stabilité. Il doit être démocratiquement controlé »
Pervenche Berès